ALLOCUTION CELESTIN BADIBANGA, PRESIDENT DE L’AICA ZAIRE, A LA CONFERENCE NATIONALE SOUVERAINE 1992
Dans son allocution, le président de l’AICA ZAIRE hausse le temps sur la situation culturelle du Zaïre. Il condamne le pouvoir en place de transformer l’usage de l’art en opium du peuple et il a fait des propositions concrètes pour le développement de ce secteur en République du ZAIRE (RDC).
Le peuple zaïrois est un peuple sinistré. Son sinistre politique, économique et social est dénoncé par tous. Mais il y en a 1, un peu plus grave qui semble échappé à l’esprit non seulement de la population, mais aussi et surtout à celui de ses dirigeants. Il s’agit du sinistre culturel. Faut-il souligner que pour asseoir la colonisation et l’aliénation du peuple congolais, la puissance coloniale s’est évertuée à couper nos populations autochtones de leurs racines culturelles, les rendant ainsi incapables d’assumer leur destin ?
Rappelons les multiples autodafés subis par les créations artistiques de nos ancêtres dans l’ancien royaume de Kongo, dans l’État Indépendant du Congo et dans la Colonie Belge du Congo ! Ces créations dont les meilleurs spécimens spoliés, font la fierté de grands musées d’occident, ont été cependant présentées à leurs créateurs et consommateurs comme des œuvres « sataniques ». De là à déduire que le génie congolais était un génie du mal, il n’y avait qu’un pas. Or, qui dit génie du mal dit génie destructeur, donc, opposé à toute aspiration au développement. D’où l’imposition de la civilisation occidentale et de ses visions artistiques comme modèle à imiter.
La période post-coloniale avait nourri les espoirs de voir réhabiliter notre patrimoine culturel de manière que le peuple se réconciliât avec lui-même afin de pouvoir mobiliser les forces de son génie créateur.
Hélas ! que des déviations l’AICA/ZAIRE n’a-t-elle pas déplorées ?
En effet l’AICA/ZAIRE qui a déployé des efforts pour contribuer au recouvrement, par les artistes, de leur identité sous l’égide du concept de l’Authenticité, a noté avec amertume le manque de conviction pour l’Authenticité dans le chef des dirigeants de la II ème République. Ces derniers en ont fait un mauvais usage dans leur vie tant publique que privée, instituant ainsi l’inversion des valeurs et la promotion des anti-valeurs. L’authenticité qui est un moteur de développement intégral comme l’a démontré le Premier Colloque National lui consacré en 1981 sous l’égide de l’Union des Ecrivains Zaïrois (UEZA), l’Authenticité donc a été travestie en opium du peuple afin d’assouvir les intérêts égoïstes de l’amour de prestige de la classe dirigeante.